Coup de coeur du libraire
La nature, plus humaine que les hommes..
Cet album bouleversant nous raconte le massacre (parmi de nombreux autres) d'une partie de la population sud-coréenne par la police sud-coréenne elle-même sous le prétexte de débarasser le pays de "cocos" (communistes)...A la sortie de la libération du pays des japonais et pendant la guerre de Corée, de nombreux massacres similaires ont été perpétré (voir aussi
Jiseul, Sarbacane, 2015).
Park Kun-woong fait ici la magnifique adaptation de la nouvelle du même nom de
Choi Yong-tak.
Nous avons le point de vu extérieur d'un frêne qui assiste au meurtre abominable de centaines de personnes. Cette perspective neutre est peut-être nécessaire face à l'atrocité de l'acte raconté.
Le trait, le texte, tout transpire de la
violence et de la
brutalité de cet acte horrible et impardonnable et nous atteint en plein cœur.
Quand on pense que ce massacre a été complètement occulté de l'histoire officielle jusque dans la fin des années 90...! Comme le dit l'artiste lui-même, il rend ici un travail de mémoire. Nous ne pouvons pas oublier que cela a eut lieu et ainsi espérer que cela ne se reproduise pas.
Un bande-dessinée difficile de par l'horreur de ce qu'elle raconte. Néanmoins, vous découvrirez un passage encore méconnu de la guerre de Corée.
Résumé
Adapté d'une nouvelle, inédite en français, de l'écrivain coréen Choi Yong-tak, Mémoires d'un frêne dépeint un moment dramatique et violent de l'histoire contemporaine de la Corée, connu comme "le massacre de la ligue Bodo". Au cours de l'été 1950, tout au début de la guerre de Corée, les autorités organisent la liquidation physique de dizaines de milliers de civils, opposants politiques déclarés ou simples sympathisants, par crainte de la contagion communiste.
Ce massacre de masse, mis en oeuvre par l'armée et la police coréennes, a fait entre 100 000 et 200 000 morts, y compris des femmes et des enfants. Par la suite, il a été délibérément occulté par l'histoire officielle de la Corée du Sud. Ce n'est qu'à partir des années 1990 que des charniers ont été retrouvés et que certains exécutants de la tuerie ont été amenés à témoigner. Auteur virtuose et engagé, Park Kun-woong poursuit ici un travail de longue haleine visant à exorciser les errements des gouvernements coréens depuis l'indépendance de 1945.
Dans ce récit, dont le narrateur est un arbre peuplant l'une des vallées où se sont déroulés les massacres, il mobilise des moyens graphiques exceptionnels, à travers un ensemble d'images d'une beauté sombre et saisissante.
Né en 1972 à Séoul,
Park Kun-woong est l'un des plus grands auteurs coréens vivants de bande dessinée. Il publie sa première oeuvre en 2002,
Fleur, fresque monumentale de près de 1000 planches évoquant l'histoire chaotique de la Corée au fil du XXe siècle. Ont été également traduits
Massacre au pont de No Geun Ri (Vertige Graphic, 2007) et les deux volumes de
Je suis communiste (Cambourakis, 2012 et 2013).
Tous ses livres sont explicitement politiques et fortement enracinés dans l'Histoire. Après avoir travaillé en couleur, dans une technique graphique proche de l'estampe, il réalise maintenant la plupart de ses albums en noir et blanc, avec un trait charbonneux qui le rend immédiatement reconnaissable.
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