Au-delà des estampes d’Hokusai ou de Hiroshige qui ont survécu à leur époque, le Japon actuel regorge d’artistes repoussant sans cesse les limites de la création. Tout au long de l’histoire, les artistes japonais ont utilisé l’art comme une forme d’activisme : par exemple, pour protester contre la guerre et l’utilisation d’armes nucléaires après le bombardement d’Hiroshima en 1945. Aujourd’hui, les artistes japonais, tout en défiant les traditions occidentales, influencent les artistes du monde entier.

Découvrez cette petite sélection de cinq artistes contemporains japonais dont vous pourrez retrouver œuvres et catalogues dans nos rayons ! 

Yayoi Kusama

Née en 1929, Yayoi Kusama est une artiste avant-gardiste que l'on peut facilement reconnaître avec ses taches et ses pois colorés. Tout a commencé par des hallucinations : son monde plein de ces formes rondes s'est ensuite retranscrit sur des toiles et des dessins, et sa maladie est au centre de son processus de création. 

L'artiste a été élevée dans une société japonaise patriarcale, incomprise de ses proches, brimée par sa mère : elle exprime souvent dans son travail un message anti-machiste, égalitaire et provocateur. Ses œuvres sont faites de couleurs vives, avec une répétition obsessionnelle de motifs (comme les pois !) au point d'en devenir hypnotiques. Elle joue également avec des installations immersives, ou des "happening", qui permettent de placer le spectateur dans l’œuvre. 

Yoshitomo Nara

Artiste incontournable de la scène contemporaine japonaise, Yoshitomo Nara, né en 1959, s’est imposé par un univers pictural parfaitement reconnaissable grâce à ses œuvres enfantines, naïves et agressives à la fois. Un contraste qui surprend et ne laisse pas insensible le spectateur, comme en témoigne le succès international de l'artiste. Il emprunte aux codes de la culture pop aussi bien de l’Asie et de l’Occident, un mélange entre les mangas japonais et cartoons américains, mais aussi à la musique punk et à l'histoire d'un Japon d'après-guerre dans lequel il est né. 

Ses œuvres se composent principalement de petites filles aux grands yeux mélancoliques, reflétant l'innocence de l'enfance, mais aussi une forme de rébellion en les figurant avec des armes, ou des cigarettes. Finalement, à travers son art, il partage une vision à la fois poétique et critique de l’enfance comme étant un état de lucidité face à la brutalité du monde adulte.

Takashi Murakami

Il rêvait d'être animateur de bande dessinée, mais son destin fut tout autre. Né en 1962, Takashi Murakami est probablement l'un des artistes japonais les plus connus de nos jours tant il est difficile de passer à côté de ses célèbres fleurs colorées. Un style reconnaissable facilement, marqué le style "kawaii" et un peu kitsch des mangas.   

C'est ainsi qu'il se revendique : il représente une génération imprégnée de l’imaginaire des mangas et des otakus. Au fil du temps, ses personnages se mettent à grouiller sur différents supports en deux dimensions ou sont moulés dans des formats divers, du minuscule au géant, en fibre de verre et peints. Ils prennent aussi la forme de ballons géants en plastique aux couleurs criardes, gonflés à l’hélium, qui envahissent les espaces d’expositions. 

Initiateur du mouvement artistique Superflat*, il a fortement contribué à démocratiser l'art contemporain, notamment au Japon.

*Le terme Superflat fait référence aux formes aplaties présentes dans l'animation japonaise, l'art graphique, les beaux-arts et la culture pop, ainsi qu'à la superficialité perçue de la culture japonaise. Ce mouvement, que Murakami a lui-même proclamé, est considéré comme postmoderne et critique à la fois de la profondeur et de la superficialité de la société japonaise contemporaine. Superflat a eu une grande influence en comblant le fossé entre l'art élitiste et la culture populaire. (source)

Chiharu Shiota

Née en 1972, Chiharu Shiota est une artiste plasticienne qui se spécialise dans la performance et l'installation. Elle est notamment reconnue pour ses installations monumentales faites de réseaux complexes et de tissages de fils de laine rouges.

Sa pratique artistique explore les notions de temporalité, de mouvement, de mémoire et de rêve, mais ce qui la rend particulièrement intéressante est qu'elle requiert l’implication à la fois mentale et corporelle du spectateur. Par ses fils tendus qui relient des objets du quotidien — clés, robes, valises, chaises, lettres —, elle évoque la présence des absents, la persistance du souvenir et la complexité des relations humaines. Son art, à la fois intime et universel, interroge la notion d’identité et de mémoire collective, tout en célébrant la beauté fragile des connexions invisibles qui unissent les êtres.

Daido Moriyama

Figure emblématique de la photographie japonaise d’après-guerre, Daidō Moriyama, né en 1938, est surtout connu pour son regard brut et poétique sur la société urbaine contemporaine. Proche du mouvement lancé par le magazine Provoke à la fin des années 1960, il s’impose par un style singulier, marqué par des images granuleuses, contrastées, floues, souvent en noir et blanc, qui rompent avec les codes de la photographie documentaire classique. 

Il s’attache à capturer la vie quotidienne : la solitude, la sensualité et la violence qui découlent des grandes métropoles japonaises, en particulier Tokyo, dont il explore les rues, l’œil derrière l'objectif. Mais il ne s'arrête pas à la rue, il interroge également la société japonaise en passant par l'image pour témoigner de sa mutation, tiraillée entre tradition et modernité.