Il y a du Socrate en lui : on l'a dit et redit ; du Montaigne aussi. Moins dialecticien que le premier, moins psychologue et moins artiste que le second, il séduit par une bonhomie, une bonne humeur, une vigueur des principes et les faiblesses des humains. Ah ! Que j'aime ses mouvements d'humeur, quand, d'un coup de bâton dans les jambes, il rabroue un importun ! J'aime aussi qu'au scandale de ses disciples il s'abandonnât à pleurer un ami cher plus longuement, beaucoup plus, que ne le permettent les bonnes manières. J'aime qu'il chantât des chansons, de vieilles chansons populaires, en s'accompagnant sur son luth, et je le vois très bien, comme Socrate lui-même, ou ce dieu dont rêvait Nietzsche, esquisser un pas de danse.
René Étiemble, Confucius